11 mai 1940: deuxième jour de guerre:

La matinée du 11 débute dans le calme et l’on en profite pour aller acheter à Jemeppe des vivres supplémentaires. La canonnade gronde toujours dans le lointain tandis que vers 7 heures sautent les ponts du Val Saint-Lambert et d’Ivoz. Vers 10h, l’Etat-Major nous ordonne d’évacuer le cantonnement de repos et d’embarquer le personnel en gare de Liers à 21h à destination d’un DRI (Dépôt de Renfort et d’Instruction). La journée se passe à la préparation de cette évacuation. Les équipes des coupoles sont définitivement mises au point. Les Lieutenants LINSMAN et CRESPIN et l’officier de PEPINSTER sont désignés pour faire partie de ce détachement qui sera accompagné du Sous-Lieutenant médecin WAUTRICHE, tandis que le Lieutenant DEFRECHEUX, officier des services extérieurs, rejoint le Fort sur ordre. Le chef du service de santé, le Capitaine-Commandant Médecin FORE se soustrait à ses obligations, et ne rejoint pas le Fort, bien qu’il en ait reçu l’ordre. Il sera porté déserteur et traduit devant le Conseil de Guerre. C’est pourquoi, contrairement aux ordres qui lui ont été donnés précédemment, le Sous-Lieutenant Médecin WAUTRICHE devra rejoindre le Fort.

Vers 11h, on assiste, en direction de Liers, à un véritable carrousel d’aviation accompagné de piqués, tandis que de la même direction nous parviennent les bruits d’explosions violentes. A 15h le lieutenant CRESPIN nous informe que tous les nœuds de communication, notamment les gares de Liers et de Jupille sont violemment bombardés, que le train précédent le sien a été détruit. La gare de Liers est en ruines et inaccessible. Nous transmettons ces renseignements au Chef de Corps, qui ordonne au détachement de rejoindre l’armée de campagne via Namur, et par ses propres moyens.

A 17h30, nous recevons l’ordre d’entrer en action avec notre matériel d’artillerie à longue portée. Nous devons interdire jusqu’à l’aube les débouchés sut et sud-ouest de Tongres (5 carrefours) à raison de 30 coups par heure et par point à interdire. Cette mission est dévolue à la coupole 150. Les calculs sont rapidement effectués et à 17h45 le Fort ouvre le feu. Ces tirs se déroulent normalement au début. Mais, peu après, dans la nuit, de nombreux incidents mécaniques et électriques ralentiront par intermittence le débit du tir (mauvais fonctionnement du monte-charge dû aux cliquets, mauvais contacts suite à de fortes pertes d’huile résultant de la dislocation des réservoirs par les chocs au départ, accouplement du moteur de direction cassé et irréparable, de nombreux écrous se desserrent par-ci par-là, percuteur plié et remplacé).

Tous ces incidents contraignent les hommes à un travail très dur et très pénible. Durant cette première nuit de combat le personnel spécialiste électricien et de matériel sera constamment à la tâche ; le Brigadier spécialiste Godin se distinguant particulièrement.

Le quadrilatère est bourré de munitions. Le fait qu’elles doivent être déplacées à bras d’homme vers la coupole constitue une difficulté supplémentaire. D’autre part, l’enlèvement des couvercles des boîtes individuelles des charges se fait difficilement. Les mouvements sur les planchers de la coupole sont pénibles, celui-ci étant imbibé d’huile. La ventilation laisse également à désirer... Elle est insuffisante et crée du bruit dans la chambre à canon. Pour y remédier on descelle la vanne réglable. Il en résulte une grande amélioration.

Sources : Récit du "Fort de Flémalle"

Nous vous invitons à visiter le Fort de Flémalle et à visiter son site internet Le Site du Fort de Flémalle.